« La Fille seule dans le vestiaire des garçons » Hubert BEN KEMOUN

ben kemoun la fille dans le vestiaireHubert Ben Kemoun est un auteur jeunesse que l’on ne présente plus tant sa bibliographie est importante. J’avais eu le plaisir de le rencontrer lors du Salon du Montreuil en 2011. Hérisson avait offert un de ses livres à Antoine et nous avions pu obtenir un autographe et un échange très sympathique. Quand les Éditions Flammarion m’ont proposé de recevoir son dernier roman pour ado, j’ai donc accepté avec plaisir.

Marion est collégienne, bonne élève, solitaire et enfouissant en elle une rage contre son père qui l’a abandonnée, elle, mais bien sûr aussi sa mère et son petit frère, pour refaire sa vie au-delà de l’Atlantique, elle  redoute les garçons tout en rêvant de tomber enfin amoureuse. Au collège, le beau gosse de la cour de récré, Enzo, ne cesse de la harceler : la complimentant lourdement. Un soir, il lui dérobe son sac, et lui promet de le lui rendre en échange d’un baiser. Mais Marion est en colère, sa rage explose et elle envoie un coup pied bien placé. Ridiculisé devant ses copains, Enzo promet de se venger.

Ce roman s’inscrit dans la collection « Émotions » des éditions Flammarion jeunesse. Sur le thème des sentiments (ainsi Malika Ferdjoukh a illustré l’Amour avec Chaque soir à 11 heures ou encore Elisabeth Barmi la Colère avec Je renaîtrai de vos cendres), les romans parus dans cette collection développent donc une émotion, un sentiment particulier traité du point de vue des adolescents. Ici, Hubert Ben Kemoun s’attaque à la Rage.

J’ai lu ce roman d’une traite tant j’étais absorbée par l’histoire de cette jeune fille et tant Ben Kemoun a su évoquer avec justesse les rapports tendus entre filles et garçons dans les collèges.

Marion, traitée d’ « intello » par tous, car bonne élève, est une jeune fille à la fois sensible et à fleur de peau. Le départ de son père qui a mis sa vie en vrac, mais aussi celle de sa mère et de son petit frère, est au centre de cette rage. L’attitude paternelle décevante entraîne une peur des hommes et surtout une peur d’être trompée. Méfiante envers les garçons de son âge, elle se montre agressive. Mais Marion est aussi une jeune fille sensible : elle compose des chansons, des poèmes, confie ses pensées à un carnet noir.

En se défendant contre Enzo, elle met le pied dans un engrenage terrible et va laisser exploser sa rage.

Ben Kemoun montre parfaitement comment la machine se met en route. Ce baiser réclamé par chantage et que Marion refuse est le détonateur. On s’étonne de sa réaction violente envers Enzo : T’es complètement tarée, Marion ! Il voulait juste te faire un smack sympa ! (p.17). Et finalement tout est là ! Cette attitude machiste des garçons envers les filles, cette banalisation de la violence envers les femmes qui commence déjà dans les cours des collèges. Marion ne se laisse pas faire, refuse de plier, ne se soumet pas, mais quand elle pense s’en sortir, elle comprends vite que cette attitude de défense, d’affirmation de soi n’est pas permise. Les filles doivent se soumettre ou être réduites aux pires quolibets : hystérique, pute.

Incapable de se confier, Marion sombre, s’enlise. J’ai pensé, immanquablement, à ces jeunes filles qui, harcelées sur Facebook, insultées, filmées à leur insu sont allées jusqu’au suicide. Marion est tombée dans cet engrenage fatale et c’est bien ce que raconte ici Ben Kemoun. Les téléphones portables, les vidéos postées sur Youtube, la suspicion, la peur d’aller au collège, les réputations qui se forgent sur un mensonge… et les adultes qui semblent si loin de tout ça, enlisaient eux-mêmes dans leurs soucis.

Avant de clore ce billet, je voulais parler du petit frère de Marion, Barnabé. Personnage-soupape, il met beaucoup d’humour et de sourires dans ce roman. Bavard invétéré, observateur comme savent l’être les enfants qui captent tellement bien tout ce qui les entoure, il est personnage très attachant, un petit frère insupportable mais aimant !

Voilà donc un roman à faire lire, aux filles comme aux garçons, car Ben Kemoun ne tombe pas dans le manichéisme qui aurait pu être si facile. Et si tout finit bien, le drame pourtant n’était pas si loin.

Roman lu dans le cadre du Challenge Cartable et tableau noir et du Challenge Ma PAL fond au soleil.

challenge cartable et tableau noirchallenge pal estivale métaphore

Merci aux Éditions Flammarion Jeunesse.

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39 Commentaires

  1. Sarah

     /  janvier 15, 2014

    Peu tu me citer une page avec de l’humour stp car j’en ai besoin pour le français et je n’ai plus le livre ….

    Réponse

à vous....