« La Poursuite de l’amour » Nancy MITFORD – Mois Anglais

mitford poursuiteQuand je me suis inscrite au Mois Anglais, mon intention était de sortir de ma PAL des romans anglais en sommeil depuis trop longtemps. Je fus le cas pour Emma et c’est aussi le cas pour ce roman de Nancy Mitford, acheté en novembre 2011. Avant de parler du roman, il faut dire quelques mots sur Nancy Mitford. Elle appartenait à l’aristocratie anglaise. Née en 1904, elle fait partie d’une fratrie comprenant 6 filles et un garçon. Parmi les sœurs de Nancy, deux furent, pendant la Seconde Guerre Mondiale, du côté d’Hitler, Diana et Unity qui s’engagea dans le Pari Nazi, tandis que Jessica appartenait au Parti Communiste et rejoignit l’Espagne pour lutter contre Franco ; Pamela s’investit essentiellement dans la cause animale. Nancy, quant à elle, plutôt de gauche, se consacra à une vie mondaine entre les deux guerres, elle rédigea un manuel sur le snobisme anglais (merci Wikipedia) et se consacra bien sûr à l’écriture de romans et de biographies.

Ce préambule me paraît intéressant pour aborder La Poursuite de l’amour. Non qu’il faille connaître la vie des auteurs pour comprendre leur œuvre, mais elle peut parfois donner un petit éclairage.

Dans ce court roman, Fanny raconte la vie de sa cousine, Linda, depuis leur enfance jusqu’à la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Fanny fut élevée par sa tante, sa mère surnommée la Trotteuse, peu maternelle et courant après les hommes, ne s’intéressait guère à elle. Elle passait ses vacances dans la vaste demeure d’Alconleigh, chez son Oncle Matthew, où elle retrouvait ses cousines dont Linda. La maison bruissait de mille cris, de conversations diverses, de disputes tonitruantes, on buvait le thé, partait à la chasse, etc. Les nombreux enfants d’oncle Matthew et de tante Sadie rappellent la fratrie de Nancy Mitford.

Bien que très différentes, Fanny et Linda eurent une amitié réelle. Nous apprendrons quelques éléments de la vie de Fanny, mais l’accent est vraiment mis sur Linda. D’esprit romanesque, Linda cherche l’amour, le vrai. Fanny est donc à la fois le témoin, la confidente et la narratrice de cette poursuite de l’amour. Le portrait qui se dessine de Linda la montre quelque peu superficielle, boudeuse dès l’enfance si elle n’obtient pas ce qu’elle veut, mondaine. C’est une femme des années 30 qui m’a fait penser à la fois aux personnages de Nemirovsky mais aussi, en quelque sorte et bien que d’une époque différente, à ceux de Françoise Sagan. Une femme qui ne se réalise que par l’amour d’un homme, qui en est dépendante. Plusieurs hommes en effet vont croiser la vie de Linda, deux maris, un amant, mais aussi des figures paternelles importantes qui vont tenter d’influer sur sa personnalité : son père tout d’abord, mais aussi Lord Merlin ou encore son oncle par alliance. Hormis Fanny, Linda fut une femme essentiellement entourée d’hommes.

Cette attente de l’amour va conditionner sa vie et lui faire commettre bien des erreurs. Parallèlement à cette quête qui paraît impossible, et la dernière phrase du roman est finalement peu optimiste, se lit dans ce roman l’histoire avec un grand H. Nancy Mitford dresse un panorama de la société anglaise : l’aristocratie d’un côté avec la famille de Linda et Nancy (la vie mondaine, la saison des bals à Londres), mais aussi la bourgeoisie d’affaires à travers les Kroesig et Tony, le premier mari de Linda : Les seules qualités intellectuelles qui méritaient leur estime étaient celles qui permettaient de faire de l’argent en quantité substantielle (p.109). Dans la deuxième partie du roman, Nancy Mitford évoque également la situation des Espagnols ayant fui Franco avant la guerre, mais aussi la Seconde Guerre Mondiale : le Général de Gaulle à Londres, les résistants, les bombardements sur Londres, les rationnements mais tout cela perçu du point de vue de Linda, c’est-à-dire un point de vue très distancié et romanesque.

L’autre élément important du roman est le ton employé et notamment dans la première partie qui se passe essentiellement à Alconleigh chez l’Oncle Matthew. Matthew est un personnage haut en couleur : il terrifie ses enfants par des colères noires et des punitions sévères qu’il finit toujours par lever plus tôt que prévu, mais aussi par son chauvinisme : il déteste les étrangers, refuse toutes les invitations, a des idées assez arrêtées sur l’éducation des filles : Oncle Matthew avait les femmes savantes en horreur, mais il considérait qu’une demoiselle de bonne famille doit, en plus de l’équitation, connaître le français et jouer du piano (p.27). Malgré tout, Oncle Matthew n’est pas si détestable qu’il en a l’air et la plume de Nancy Mitford a le chic pour le rendre sympathique en s’en moquant gentiment.

Bien que court, ce roman aborde beaucoup de thèmes différents et s’ancre dans une époque bien précise, cet entre-deux guerre à la fois léger et qui sent venir la tempête : C’est assez triste, dit-elle un jour, d’appartenir comme nous à une génération sacrifiée. […] On n’oubliera même que nous avons jamais existé. Nous pourrions aussi bien n’avoir jamais vécu. Je trouve que c’est pitoyable ! / – Nous deviendrons peut-être une sorte de curiosité littéraire, dit Davey. (pp.247/248). Elle sonne le glas d’une époque que Linda incarnait : une époque frivole, mondaine, où la femme devait être belle et bien habillée et tout entière attachée à son homme. Bien que le ton soit souvent léger, ce n’est finalement pas un roman si léger que cela, mais les personnages vivent leurs épreuves avec tout le flegme britannique qui les caractérise.

Roman lu dans le cadre du Mois Anglais organisé par Titine et Lou ; du Challenge I Love London et du Challenge God save the livre. Enfin du Challenge Ma PAL fond au soleil.

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42 Commentaires

  1. chaplum2

     /  juin 21, 2013

    Il est dans ma PAL. Il faut vraiment que je trouve le temps de l’en sortir !

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  2. Il est également dans ma PAL. Pour aller plus loin que Wikipedia, je te conseille vivement la lecture de Ces extravagantes soeurs Mitford, de Annick Le Floc’hmoan, qui est passionnant et donne plein d’envies de lectures, Nancy n’étant pas la seule des soeurs à avoir écrit et comptant quelques écrivains parmi ses amis intimes.

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