« Du côté de Castle Rock » Alice MUNRO

munro castle rockAlice Munro a reçu en 2013 le prestigieux Prix Nobel de Littérature et c’est par ce Prix que le Club des Lectrices a décidé de la mettre au programme de lecture pour le mois de décembre. Nous devions en effet trouver un auteur nobélisé et nous avions été trois à proposer non seulement Munro, mais ce roman, le seul en fait de cette auteure qui est essentiellement nouvelliste. Je connaissais Alice Munro sans l’avoir encore lue et je possédais d’ailleurs ce roman dans ma PAL.

Alice Munro est Canadienne, mais, dans ce roman, elle décide de raconter l’histoire de ses ancêtres écossais qui ont quitté leur pays pour immigrer au Canada. Elle remonte donc au XVIe siècle jusqu’au temps de l’écriture ce roman. Le roman peut être vu comme divisé en deux parties : la première partie concerne le temps avant sa naissance, la deuxième depuis sa naissance jusqu’au temps de l’écriture du roman. Le deux parties sont également construites de façon un peu différente, puisque dans la première, Alice Munro la subdivise en diverses parties traitant chacune d’une génération de ses ancêtres. Dans la deuxième, elle s’attache à ses propres souvenirs : enfance, adolescence, premier mariage et vie contemporaine ou vieillesse.

Ces ancêtres viennent d’une terre d’Écosse qui ne possède aucun avantage, comme Alice Munro le signale dès l’ouverture du roman. Plus loin dans le roman un des personnages dira également : Naître dans la vallée d’Ettrick, c’est naître dans une région arriérée, affirmait-il. Où les gens croient tous à de vieilles histoires et voient des fantômes, et je vous le dis, c’est une malédiction d’être né dans la vallée d’Ettrick (p.80). La terre fait les hommes, même quand ceux-ci quittent leur terre d’origine et c’est bien ce que va montrer Alice Munro dans ce roman.

J’ai particulièrement aimé la première partie, la seconde m’est apparue plus longue, parfois un peu ennuyeuse et j’ai même, je l’avoue, sauté quelques pages. Dans cette première partie, Alice Munro prend appui sur quelques documents généalogiques, ainsi que sur quelques écrits laissés par ses ancêtres, pour imaginer ce que fut la vie de ces hommes et de ces femmes qui sont à l’origine de sa naissance. On y croise Walter Scott parti recueillir les récits d’une aïeule de Munro, on découvre la vie austère, marquée par la religion, de ces gens qui durent immigrer pour trouver plus de terre. Le récit de la traversée en bateau est sans doute le point d’orgue de ce roman, un récit passionnant qui m’a vraiment fait entrer dans ce roman.

La famille de Munro est une famille de paysans dévoués totalement à leur terre ou à leur élevage. L’auteur raconte la dureté de la vie, le climat, la neige, les congères. Mais, à chaque génération, Alice Munro met l’accent sur certains des membres de sa famille qui soit écrivaient, soit lisaient, comme son grand-père qui se dépêchait de finir son ouvrage pour pouvoir lire tranquillement. Par ces notification, sans doute veut-elle ainsi expliquer sa propre vocation d’écrivain, vocation qu’elle évoque ensuite, mais très peu, dans la seconde partie.

L’autre intérêt que je retiens de ce roman est la place et le rôle des femmes évoquées au cour des siècles. Alice Munro, sans être dans un langage exagérément engagé, montre les mariages organisés, les grossesses successives et parfois tragiques autant pour l’enfant que pour la mère, les corvées ménagères et les rumeurs qui ont tôt fait de courir sur les jeunes filles.

– Que ferez-vous dans l’Ouest Canadien ?

Cela lui semble la plus sotte des questions. Elle secoue la tête – que peut-elle dire ? Elle fera la lessive, la couture, la cuisine et donnera presque certainement la tétée à de nouveaux enfants. L’endroit où cela se passera n’a guère d’importance. Ce sera dans une maison, et pas des plus belles. (p.91).

Cette citation résume assez bien le sort de ces femmes.

Si je suis heureuse d’avoir fait la connaissance d’Alice Munro à travers ce roman autobiographique (car la fiction se mêle à la réalité), j’avoue ne pas avoir ressenti un très enthousiasme regrettant que la deuxième partie ne montre pas plus l’émergence de sa vocation d’écrivain.

Roman lu dans le cadre du Challenge Lire avec Geneviève Brisac, Le Club des Lectrices et du Plan Orsec pour PAL en danger 2014.

Challenge-Genevieve-Brisac-2013PAL Orsec 2014

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23 Commentaires

  1. Ton avis rejoint ce qu’on m’avait dit à propos de ce roman, je ne suis pas tellement tentée du coup. J’ai, par ailleurs, lu la première nouvelle de « Trop de bonheur » qui ne m’a pas transcendée, je réessayerai plus tard Alice Munro mais pour l’instant, bof…

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  2. Rangé soigneusement : à lire le moment venu. 🙂
    Bonne année George, et à toutes tes lectrices ❤

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  3. J’avoue que je n’ai que peu l’envie de découvrir Alice Munro. Toutes les pages que j’en ai feuilletées et les résumés que j’en ai lus ne m’inspirent pas trop :/

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  4. Je suis actuellement en train de lire Fugitives d’elle et mon impression est carrément mitigée. Ça parle de femmes, c’est sensible, mais sans plus. Un peu trop féminin, traduction bizarre, chutes inexistantes. Je publierai un article dans quelques temps !

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  5. Je ne suis pas emballée … Pour une fois 😉

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  6. Malgré les quelques réticences que tu as relevées, je suis assez convaincu par ce que tu dis de ce roman. J’aime beaucoup les livres qui racontent le destin de personnes qui rêvent de trouver ailleurs ce qu’ils ont arrêté de chercher autour d’eux.

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  7. Rah la place des femmes traitée en littérature, un sujet inépuisable 🙂

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  8. J’ai un livre en attente à la bibliothèque, mais je ne sais plus lequel

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  9. J’ai le même dans ma PAL, ça m’inquiète parce qu’après avoir tellement aimé « Fugitives » j’ai été déçue par « trop de bonheur ».

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    • Pour ce roman il faut vraiment le lire pour voir parce que les avis sont assez différents. Dans mon Club de lecture, certaines ne sont pas allé jusqu’au bout, d’autres l’ont fini mais n’ont pas aimé et puis d’autres encore ont aimé.

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  10. Je pensais commencer par des nouvelles…

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  11. Je suis loin d’être une inconditionnelle de la dame, mais il vaut mieux la juger sur ses nouvelles qui sont sa spécialité et qui n’ont pas les défauts de construction de ce roman. Je ne suis pas fan car au bout d’un moment je trouve ça répétitif mais je reconnais que le recueil Les Lunes de Jupiter (lu et chroniqué sur le blog) est vraiment réussi. Je crois avoir lu Fugitives il y a plusieurs années mais ça ne m’avait pas intéressé.

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  12. Je l’ai dans ma PAL. J’ai lu ton billet en biais mais je reviendrai quand je l’aurai lu. Ca me paraît plus complexe que je ne l’imaginais.

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à vous....