« La Carte et le territoire » Michel Houellebecq

Quand le site Priceminister m’a proposé de m’envoyer soit le roman de Despentes soit celui de Houellebecq, j’ai saisi l’occasion … Sans avoir lu tous les articles de presse parus sur le roman de Houellebecq depuis le mois de juin, j’avais cependant suivi différentes émissions radio et télé, qui me donnaient envie d’en savoir un peu plus (Le Masque et la Plume sur France Inter ; Le Cercle sur Canal+ ou encore ça balance à Paris sur Paris Première). Pourtant j’y allais un peu sur la pointe des pieds… on n’aborde pas Houellebecq comme on aborde n’importe quel autre auteur… et c’est sans doute ce que je regrette ! Qu’on le veuille ou non, quand on lit un auteur médiatique, les attentes littéraires ne sont pas les mêmes. On a des présupposés, des a-priori, des idées toutes faites, et il faut parvenir à s’en défaire pour pouvoir de lancer plus sereinement dans la lecture… Le problème c’est que dans ce roman, tout vous ramène au médiatique, au people et au personnage même de Houellebecq.

Le roman prend comme personnage principal Jed Martin, artiste parisien. Nous suivons donc les débuts fulgurants de cet artiste jusqu’à sa mort dans les années 2030 environ ! Bien que jouant avec les ficelles réalistes (noms de villes et de régions réels, personnages existants, références artistiques connues), Houellebecq insère des éléments inventés (l’homosexualité de Jean-Pierre Pernaut; la mort de Houellebecq, entre autres…). Cette plongée dans le monde de l’art  moderne parisien  est intéressante et bien menée, assez critique aussi, et l’on sent une parfaire connaissance de ce milieu par l’auteur. Le fait de mettre en scène des personnages de la scène médiatique comme Frédéric Beigbeder (ami de Houellebecq) ou Jean-Pierre Pernaut, en passant par Lelay, rend la lecture souvent drôle. Mais le personnage réel qui a droit à un traitement plus développé est Michel Houellebecq lui-même.

Comme Amélie Nothomb se met en scène dans son nouveau roman, Houellebecq crée son auto-personnage. A croire que les auteurs très médiatisés sont un peu obsédés par leur image….

Pourtant Houellebecq est sans complaisance avec son auto-personnage. Il le montre tel qu’on se l’imagine à travers les médias : alcoolique, gros fumeur, silencieux et renfermé, a-social… Est-ce le Houellebecq réel ou le Houellebecq médiatique, ou en est-ce encore un autre ? J’ai souvent eu l’impression en le lisant, que Houellebecq s’était amusé à grossir le trait de l’écrivain tel qu’il nous apparaît dans les médias… Je me suis également posé la question de l’utilité littéraire de cet auto-personnage. Comme dans une mise en abyme folle, le fait d’insérer des personnages médiatiques dans un roman qui traite (entre autre) des médias, n’est-ce pas aussi pour rendre médiatique ce roman? … vous me suivez ? Mise en abyme d’autant plus folle que le roman est écrit par Michel Houellebecq, que l’un des personnages est un certain Michel Houellebecq, que même le chien de l’inspecteur de police s’appelle Michel, que le peintre peint un portrait du personnage Michel Houellebecq…tout cela peut apparaître vain… vain, si ce n’était, cependant, que le roman va au-delà de ce simple procédé littéraire connu depuis André Gide …

Je ne m’attendais pas à un style narratif aussi efficace et aussi varié. Le roman, composé en trois parties (+ un épilogue), traite donc autant de l’art, que du mal être social, des médias et enfin nous plonge dans un polar pour le moins bien ficelé… J’ai un peu plus peiné sur les longues digressions sur l’histoire de l’architecture, sur les procédés photographiques ou autres, mais dans l’ensemble, je peux dire que j’ai été heureusement surprise. Bien sûr, on n’évite pas les quelques passages sur le sexe, le père de Jed a un cancer et bien sûr de l’anus, le chien de l’inspecteur  et l’inspecteur lui-même ont tous les deux des problèmes de stérilité,bien évidemment les prostituées sont présentes avec leurs gros seins et leur vagin humide… mais dans l’ensemble, rien de bien sulfureux.

Sans être une découverte bouleversante, cette lecture fut agréable et finalement rapide, pas sûre, cependant, qu’elle ne me laisse un souvenir impérissable !

5/7

avec Lili Galipette et Hérisson

Merci à


Article suivant
Poster un commentaire

65 Commentaires

  1. Mon premier essai de Houellebecq aussi grâce, comme toi, au partenariat Price Minister. Je suis dedans actuellement: pas désagréable, il arrive même à me faire sourire le bonhomme mais j’ai un peu de mal avec ce que je qualifierais de « tics d’écriture », un peu lourds à la longue. Et pourquoi diable tous ces mots en italique? Hein pourquoi? Je développerai ça dans mon billet. 😉

    Réponse
    • leslivresdegeorgesandetmoi

       /  octobre 6, 2010

      J’ai hâte de lire ton billet… c’est marrant ça les mots en italique, à part les titres de romans de Beigbeder, je ne les ai pas vus !!! bizarre bizarre !! 😉

      Réponse
  2. Je n’ai jamais accroché à cet auteur….un peu farfelu et surmédiatisé !

    Réponse
    • leslivresdegeorgesandetmoi

       /  octobre 7, 2010

      Le côté farfelu ne me dérange pas, moins que l’aspect sur-médiatique !!!

      Réponse
  3. Je l’ai lu… Et je l’ai aimé dans l’ensemble. Je trouve ta critique assez juste. Sinon je trouve dommage de ne pas vouloir lire un auteur parce qu’il est surmédiatisé. (même si j’en conviens, c’est agaçant) On peut parfois louper de bonnes choses en boycottant ! Pour ceux et celles que cela pourrait intéresser, j’ai organisé un petit concours pour en gagner un exemplaire, cela peut vous permettre de vous faire votre propre avis sans l’acheter pour autant.

    Réponse
    • leslivresdegeorgesandetmoi

       /  octobre 7, 2010

      Disons qu’effectivement ça bloque un peu, quant à boycotter c’est un peu dommage quand on a rien lu de l’auteur en question… mieux vaut tenter une première fois… me concernant j’ai fait une croix sur Nothomb et Teulé après deux livres lus de chacun…
      Merci pour ta proposition !!!

      Réponse
  4. Je l’ai reçu également, dans le même cadre que toi… Etant donné que j’avais déjà acheté le Despentes (pas encore lu d’ailleurs…), j’ai accepté cette proposition par curiosité. Je pense le commencer ce week end mais je peux déjà dire qu’il m’intrigue beaucoup !

    Réponse
    • leslivresdegeorgesandetmoi

       /  octobre 8, 2010

      Je te souhaite une bonne lecture, je viendrai lire ton avis !!! 😉

      Réponse
  5. Je ne crois pas pouvoir supporter un écrivain qui ne regarde que son nombril! Tu as raison, il faut se débarrasser de ses préjugés pour lire un livre sereinement mais il représente tout ce que je n’aime pas dans la littérature : le nombrilisme donc, l’amour immodéré de soi-même, le snobisme d’une certaine intelligentsia parisienne, la vanité de paraître, le recours aux médias et à la provocation pour se faire un nom,le manque d’intérêt pour les autres, la superficialité. Où est le talent dans tout ce fatras? J’ai lu un livre de lui assez répulsif et je crois que cela me suffit!!!
    Quand je pense à la modestie dont faisait preuve George Sand, au regard critique et lucide qu’elle portait sur son oeuvre, je me dis que beaucoup d’écrivains, de nos jours, auraient besoin de prendre avec elle une leçon de grandeur!

    Réponse
    • leslivresdegeorgesandetmoi

       /  octobre 10, 2010

      Oh que oui, Sand avait même tendance à dénigrer son œuvre… je suis entièrement d’accord avec toi et c’est ce qui m’a le plus gêné dans ce roman, l’impression de participer à une vaste entreprise d’auto-médiatisation !!!

      Réponse
  6. je l’ai terminé tout à l’heure…
    bientôt (hum) mon billet !

    Réponse
  7. je viens de le terminer et je l’ai trouvé intéressant en particulier j’ai bien aimé la descriptions des relations entre artistes et entre disciplines artistiques

    Réponse
    • leslivresdegeorgesandetmoi

       /  octobre 12, 2010

      C’est vrai que le monde de l’art contemporain est bien rendu… il me manque quand même un petit quelque chose !

      Réponse
  8. Je viens d’écrire un billet. Je l’ai lu dans le même cadre que toi et j’ai aimé bizarrement. 😉

    Réponse
  9. Je viens également d’écrire mon avis sur ce roman, et je suis tout à fait d’accord avec toi, je n’ai pas vu l’utilité de se mettre en scène dans son propre roman!

    Réponse
  10. J’ai pour ma part été déçu par ce roman: trop de longueurs à mon goût, une troisième partie (policière) inutile et ennuyeuse, un style pas aussi impressionnant que par le passé. Et trop de people, aussi. Evidemment, il y a quand même des qualités: l’ascension de Jed, ses rapports avec son père, et un peu d’humour (les autoportraits). Mais même cette autodérision, avec du recul, me paraît un peu fausse, et donne l’impression que l’auteur a voulu mettre de l’eau dans son vin pour plaire au média. Pas de scandale, ni de polémique, pas de sexe, et l’auteur semble dire « regardez comme je parviens à me moquer de moi-même », bref, tout cela me semble un peu calculé. La carte et le territoire m’a quoi qu’il en soit déçu.

    Réponse
    • leslivresdegeorgesandetmoi

       /  novembre 17, 2010

      Votre analyse est juste et j’ai ressenti moi aussi ce côté « marketing » qui finalement a porté ses fruits puisqu’il a reçu le Goncourt… ce n’est pas LE roman de la Rentrée, il y a eu d’autres romans français bien plus novateurs ! Merci pour votre commentaire !

      Réponse
  11. Je me retrouve ici suite au lien laissé dans le billet Price Minister. J’ai entamé ce roman et l’ai abandonné. Comme j’avais abandonné « Les particules élémentaires » et « Extension du domaine de la lutte ». Je trouve cet auteur pédant, nombriliste et sa littérature oppressante. Dans le Goncourt, il y a de plus de nombreux lieux communs qui m’ont vraiment lassée.
    Je viens par contre de découvrir « La tarte et le suppositoire » un pastiche signé Michel Ouellebeurre et j’ai beaucoup aimé et ri car cet auteur mystère partage mon point de vue et l’exprime très bien.

    Réponse
  12. Flo

     /  mars 27, 2014

    Premier et seul contact avec Houellebecq en ce qui me concerne et j’ai exactement le même ressenti que vous!

    Réponse

à vous....