« Guide de l’incendiaire des maisons d’écrivains en Nouvelle-Angleterre » de Brock Clarke

Le titre est incontestablement tentant pour les lecteurs que nous sommes, et d’autant plus quand on découvre que des noms tels que ceux d’Edith Wharton et de Marc Twain sont évoqués.

Sam Pulsifer, à l’ouverture du roman, sort de prison où il a passé les dix dernières années après avoir incendié la maison d’Emily Dickinson et avoir provoqué, par accident, la mort d’un couple qui batifolaient dans la chambre de la célèbre poétesse. A sa sortie de prison, son père lui montre de nombreuses lettres qui lui étaient destinées. Dans ces lettres, les expéditeurs suggéraient alors à Sam d’incendier, pour diverses raisons, d’autres maisons d’écrivains de Nouvelle-Angleterre, dont celle de Mark Twain, par exemple.

Je n’en dirai pas plus car ce roman est un entrelacement de péripéties que je préfère vous laisser découvrir. Mon avis est assez mitigé sur ce roman, comme cela arrive parfois, c’est un roman qui ne m’a ni plu ni déplu, et c’est un peu cela le problème. J’ai aimé le ton ironique, un certain cynisme même, et plusieurs situations assez drôles voire certaines réflexions sur l’utilité des livres et des histoires que l’on nous raconte.

Sam a été élevé par une mère prof de lettres et un père éditeur aux presses universitaires, un univers donc propice à la lecture, mais qui a plutôt dissuadé Sam à lire qu’encouragé. Sam n’aime pas les livres, et ne comprend en quoi ceux-ci peuvent lui servir. D’ailleurs, à sa sortie de prison, il découvre que sa mère s’est débarrassée de tous ces livres et que son père ne travaille plus, l’un et l’autre ayant préféré s’adonner à la boisson. Ce roman n’est donc pas à hymne à la lecture ni aux auteurs. Et quand Sam shoote dans un roman d’Edith Wharton avec conviction, j’ai eu le cœur serré. Mais tout en remettant en question l’intérêt de la lecture, Brock Clarke démontre aussi son importance, par défaut. Ce qui est principalement reproché aux livres, et plus spécifiquement aux romans, est de donner une fausse vision de la réalité, mais ce ne sont pas tant les livres que l’on accuse que les auteurs eux-mêmes.

En résumé, je souhaiterais que vous mettiez le feu à la maison de Mark Twain pour la raison que le professeur Ardor voit en Mark Twain […] un individu parfaitement répugnant d’un point de vue moral. (p.196)

Il y a une différence entre vouloir brûler la maison d’un écrivain et vouloir brûler les livres (ce dont il n’est pas question, bien que les livres soient quelque peu maltraités). Dans le premier cas on cherche à atteindre l’homme, dans l’autre l’œuvre.

Le mensonge est au cœur du roman de Brock Clarke, et quand il dénigre les livres, on se plait à penser qu’il ment lui-même. Ici les professeurs de littérature ne croient plus en la littérature qu’ils accusent de mensonges. Pourtant, petit à petit Sam va finir par reconsidérer son désintérêt pour les livres, et finalement sa mère va se remettre à lire… c’est sans doute la preuve que tout n’est pas perdu. Mais avant d’en arriver là, Sam aura dû se poser plusieurs questions sur l’utilité de la lecture dont :

Et c’était peut-être pour ça aussi que les gens lisaient : non pour se sentir moins seuls, mais pour paraître moins seuls aux yeux des autres gens, et ainsi éviter d’être pris en pitié et avoir la paix. (p.235)

Questions  et interrogations auxquelles je n’adhère pas.

Tout ceci pourrait laisser croire que ce roman m’ait plu. MAIS, pas totalement, et notamment à cause de développements peu intéressants, des péripéties quelques fois trop loufoques, et sans doute un personnage parfois un peu énervant dans sa complaisance au mensonge et à la passivité. L’enlisement dans le mensonge a toujours tendance à beaucoup m’agacer, et je ne parviens pas à concevoir que l’on puisse préférer maintenir le mensonge au lieu de vouloir sauver la situation en révélant la vérité. J’aurais aimé aussi une réflexion un peu plus profonde sur la littérature, réflexion présente mais qui ne va pas assez loin à mon goût.

Toutefois ce roman reste un bon divertissement mais aurait gagné en efficacité avec une cinquantaine de pages en moins.

Roman lu dans le cadre du Challenge Le Nez dans les livreset du S.T.A.R 4

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22 Commentaires

  1. liligalipette

     /  avril 18, 2012

    Je te lirai plus tard, je suis à la moitié du livre !

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  2. pareil pour moi, je suis dedans…

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  3. Le thème semble intéressant malgré ton avis mitigé. J’attends de lire d’autres impressions pour me faire une idée…

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  4. Ton avis ne me donne pas envie, je passe ! J’attendrai l’avis de Lili aussi…

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  5. ton opinion chute un peu par rapport à ton enthousiasme à la lecture des premières pages…mais tu n’as pas émoussé mon attirance pour ce roman… ouf !

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  6. Sur l’utilité des livres il faut lire le texte La Fin des livres d’Octave Uzanne et Albert Robida (fin XIXe siècle). C’est très amusant.

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  7. Je l’avais noté il y a longtemps mais je vais peut-être l’oublier.

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  8. Le thème était effectivement très tentant mais si tu n’es pas plus convaincue, je passe mon tour !

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    • J’ai vu sur Babelio que plusieurs ont abandonné la lecture, moi j’ai un peu peiné, j’avais hâte de le finir mais je ne me suis pas véritablement ennuyée et je l’aurais sans doute lu plus vite en ayant eu plus de temps !

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  9. Je ne vais pas augmenter ma LAL, tobn avis ne m’en donne pas envie. Merci George

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  10. Depuis « Le rire » d’Aristote justifiant tous les meurtres commis dans « Le nom de la rose », on savait que la littérature pouvait être dangereuse pour le lecteur. Ce thème est débattu-rebattu depuis fort longtemps dans la littérature, je pensais qu’un peu d’humour anglais pouvait relever la sauce d’une salutaire acidité, vous semblez dire que ce n’est pas le cas.
    Je passerai donc mon chemin.
    Merci pour cette analyse!

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  11. Je passe aussi. Tant pis!

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  12. Je suis encore plus intriguée après la lecture de ton avis qu’avant !

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à vous....