« Honoré et moi » de Titiou LECOQ

Béatrix est tout le premier roman que j’ai lu de Balzac. Je devais être en seconde, je crois. Ce roman, peu connu ou du moins qui ne fait pas parti des plus connus, est un roman à clefs. Les personnages sont des doubles romanesques de Marie d’Agoult et de Franz Liszt. On y trouve aussi George Sand sous les traits de Félicité des Touches. Je n’avais alors lu aucun roman de George Sand, mais je me plais à penser que ce roman était un premier signe de mon intérêt pour elle. J’ai donc un peu découvert Balzac et Sand en même temps. Depuis j’ai lu plusieurs romans de Balzac, même certains plusieurs fois : le magnifique Splendeurs et misères des courtisanes (qu’il faudrait que je relise), Le Père Goriot (lu 2 ou 3 fois), Le Lys dans la vallée, Illusions perdues, La cousine BetteLes Chouans et puis « Le chef d’oeuvre inconnu », « Sarrasine », Le Colonel Chabert etc etc. Et il m’en reste encore tellement à découvrir. Bref, Honoré et moi, on se fréquente depuis longtemps. Quand j’ai vu la biographie de Titiou Lecoq, avec ce titre qui me parle tellement (mon blog, je vous le rappelle s’intitule : Les livres de George Sand et moi »), et tous les avis élogieux des copinautes, j’ai un peu résisté (un tout petit peu) et j’ai craqué !

On ne va pas passer par quarante mille chemins, j’ai adoré cette biographie. C’est à la fois léger, construit, documenté, intelligent, drôle, vivifiant… Titiou Lecoq nous dépoussière Honoré, nous le rend vivant, humain, attendrissant et encore plus génial. Tout commence par sa visite décevante du Musée Balzac à Paris, et à sa sortie une envie furieuse d’en savoir plus. Le postulat départ est simple et original : Balzac « c’est […] un type qui a tout raté » (p.13).

La biographe se propose donc de raconter la vie d’un des plus grands auteurs français en montrant comment toute sa vie fut un véritable désastre, financier surtout, mais pas seulement. Elle raconte ses entreprises catastrophiques que ce soit la création d’un journal, d’une imprimerie, ses placements ruineux, ses demandes perpétuelles de prêts, son manque d’argent continuel et ses dépenses pharaoniques. Mais il y a aussi les entreprises qu’il imagine sans les mener à bien (et heureusement) comme cette épicerie gérée par lui, avec George Sand à la caisse et Théophile Gautier dans les rayons. Dépensier invétéré, Balzac est un dingue de décoration et rêve de luxe. Plusieurs anecdotes racontées donnent de lui une image que je ne connaissais pas. C’est vraiment un des grands points forts de cette biographie. Comme un pygmalion, Titiou Lecoq donne vie au buste de marbre du grand écrivain.

L’autre point fort, et que j’ai encore plus apprécié, est le point de vue féminin que la biographe insuffle à son ouvrage. Je dis féminin et non féministe, car, comme pour George Sand, le mot ne me semble pas approprié. Quoiqu’il en soit, à plusieurs reprises, Titiou Lecoq fait émerger, au sujet des romans balzaciens, des remarques qui les font voir sous un jour un peu différent. Ainsi grâce aux pages 96 et 97, j’ai furieusement envie de lire La Femme de trente ans. Elle revisite ainsi certains romans montrant les préoccupations de Balzac pour les femmes. Son amitié pour George Sand (beaucoup citée d’ailleurs) en est peut-être pour quelque chose.

Enfin, et pour rebondir sur ce que je viens d’écrire, j’ai beaucoup apprécié les nombreuses citations d’autres auteurs prises dans la correspondance et l’on sent une véritablement documentation mais aussi un véritable amour pour Honoré et son oeuvre : c’est ce qui fait de cette biographie une réussite. Certes elle ne se présente pas comme érudite, et les puristes pourraient être choqués de termes trop familiers pour parler du grand homme et de son oeuvre, mais c’est ce qui en fait son charme et rend cette lecture tellement jouissive. Je sais déjà que quand il sortira en poche, je le donnerai à lire à mes élèves. Et puis ces petites parenthèses dans lesquelles elle nous incite à lire telle ou tel ouvrage de Balzac, évident , mais pas seulement. D’ailleurs, je crois finalement que la grande réussite de cette biographie est de nous donner envie de lire Balzac.

Pour finir, je voudrais citer cette phrase de Balzac, que l’on trouve à la fin de l’ouvrage, et que nous devrions tous faire nôtre :

Je fais partie de cette opposition qui s’appelle la vie.

 

 

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8 Commentaires

  1. J’avoue que l’ayant mis en rayon en librairie, il ne m’a pas plus tenté que ça mais au vu de ton avis, je pense que je pourrais bien aimé cette biographie, surtout que j’ai adoré Libérées de la même autrice !

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  2. Je te le confirme, il donne sacrément envie de lire Balzac 😉

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  3. Je ne lis que du bon de cette biographie alors je crois qu’à un moment ou à un autre je vais céder 🙂

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  4. Je n’osais pas et je ne regrette pas d’avoir franchi le pas. Cette bio est un régal d’intelligence, de pétillance

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